Résorber la précarité énergétique : une proposition de loi socialiste plus inclusive
Avec plus de 37,2 millions de logements en France, dont 82 % de résidences principales, 10 % de résidences secondaires et 8 % de logements vacants. Le secteur du bâtiment représente 43 % de l’énergie consommée, loin devant le secteur des transports (31,3%).
A noter que les 2/3 sont consommés pour le résidentiel et 1/3 pour les services (commerces, administrations, salles de spectacle, entre autres).
Cette précarité est particulièrement présente dans le parc de maisons individuelles construites avant la première réglementation thermique de 1975. En effet, 14 milliards d’euros par an sont engloutis dans la production de chaleur des maisons d’avant 1975.
La rénovation énergétique des bâtiments constitue donc un des leviers pour tendre vers un modèle de développement en adéquation avec les objectifs de neutralité carbone à l’horizon 2050.
Des dispositifs incitatifs sans retombées probantes
Certes, des aides et des dispositifs ont été mis en œuvre mais assez complexes et faiblement lisibles, dont chacun est doté de ses propres conditions d’éligibilité et parfois exclusifs les uns des autres. Ainsi, ces efforts pour adapter les logements aux nouveaux défis du siècle n’ont pas eu les effets attendus.
Parmi les plus connus, le dispositif MaPrimeRénov’, bien qu’il ait contribué à financer la rénovation de 670.000 logements, n’a permis d’engager que très peu de rénovations globales et véritablement performantes. Car trop peu de personnes s’engagent dans un parcours de rénovation. Plus de la moitié des passoires thermiques sont pourtant des maisons individuelles, mais seuls 32% du parc privé a fait l’objet de travaux de réhabilitation.
Les raisons en sont simples : près de la moitié des ménages résidant en passoire thermique ont des revenus modestes voire très modestes. 37 % de ces logements sont occupés par des ménages vivant en dessous du seuil de pauvreté.
On le voit bien, la précarité énergétique s’accroît et le nombre de logement dits « passoires thermiques » ne baisse pas.
Il y a donc urgence car la hausse générale des prix de l’énergie a des conséquences importantes sur tous les ménages, tout particulièrement sur les plus vulnérables et les logements les plus énergivores vont disparaître du marché de la location, faute de rénovation. Cette interdiction est entrée en vigueur au 1er janvier 2023 pour les logements en classe G qui ont une consommation supérieure à 450 kWh. Elle concernera tous les biens classés G à compter du 1er janvier 2025.
En tant que membre de la commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique je suis très attaché à ce sujet majeur compte tenu des enjeux de pouvoir d’achat des ménages, de compétitivité des entreprises et de maitrise de la dépense publique. Dans ce contexte, l’enjeu de la rénovation énergétique dans le bâti existant et dans le logement est crucial.
Recentrer l’effort budgétaire sur les passoires thermiques et engager une stratégie de rénovation plus inclusive
Ainsi, avec plusieurs de mes collègues socialistes, nous avons déposé une proposition de loi visant à résorber la précarité énergétique. Car, la réhabilitation thermique des bâtiments résidentiels répond à la fois à un enjeu social, en diminuant les dépenses énergétiques des ménages et en améliorant leur confort de vie (plus de 5,6 millions de ménages sont en situation de précarité énergétique), à un enjeu environnemental, en permettant à la France de respecter ses engagements climatiques dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015 et enfin à un enjeu économique en termes de création d’emplois locaux.
Cette rénovation thermique est aussi une mesure de rééquilibrage des territoires (les ménages qui s’imposent le plus de restrictions sont ceux situés dans les communes rurales et les bourgs de moins de 20000 habitants) et une mesure de santé publique (les différentes conséquences d’une mauvaise isolation, comme un logement humide ou mal chauffé, entraînent des risques de pathologies amplifiées chez les personnes âgées ou fragiles).
Notre proposition de loi entend donc rendre plus efficientes les politiques publiques de rénovation énergétique. Elle entend recentrer l’effort budgétaire du pays sur les passoires thermiques ; engager une stratégie de rénovation plus inclusive, pour sortir les 5,6 millions de ménages de la précarité, qu’ils soient propriétaires ou copropriétaires, bailleurs ou occupants.
Il est ainsi proposé de :
- Mieux flécher les aides publiques vers les travaux de rénovation énergétique performante
- Instaurer un reste à charge zéro pour les propriétaires les plus vulnérables
- Poser le principe de l’égal accès aux guichets France Renov et aux accompagnateurs Renov sur l’ensemble du territoire, y compris dans les zones de faible densité de population
Ces trois priorités d’action permettront également de donner aux acteurs de la rénovation un cap et des perspectives stables :
- le propriétaire pourra réaliser les travaux de rénovation globale en plusieurs tranches dans le cadre d’un parcours financé et accompagné.
- les critères de performance énergétique minimale seront appliqués aux locations dites « Airbnb », à compter du 1er janvier 2025, pour anticiper les risques de contournement de la loi et préserver le parc locatif.
- les spécificités territoriales seront prises en compte afin de favoriser l’adaptation des normes et l’innovation dans les techniques et matériaux de rénovation.
Pour une transition énergétique efficace et égalitaire, il est nécessaire d’accélérer le rythme des rénovations globales des logements et de soutenir davantage les propriétaires les plus modestes.
Gageons que notre proposition de loi trouvera un écho favorable afin d’améliorer le quotidien de nos concitoyens et d’honorer nos engagements de neutralité carbone d’ici 2050.