Malgré la combativité des sénatrices et sénateurs de gauche, le Gouvernement et la droite imposent leur réforme des retraites

Après de nombreuses semaines de débats agités et souvent stériles, la réforme des retraites a finalement été adoptée par 49-3 ce lundi 20 mars, entraînant dans sa foulée le dépôt d’une motion de censure du gouvernement. Le gouvernement resté sourd à la mobilisation des français partout sur notre territoire, a donc choisi la voie du passage en force sur un texte décrié, inefficace au regard des exigences des comptes publics et injuste pour nos concitoyens.

Si à l’Assemblée nationale, l’action conjuguée du gouvernement et de certains députés a empêché l’examen et le vote de l’article 7 repoussant l’âge légal de départ à la retraite, les sénateurs des groupes de gauche du Sénat, étaient déterminés à examiner ce texte et à s’y opposer avec toute la force de leurs arguments, et ils étaient nombreux. Nous avions des propositions à faire valoir pour combattre cette réforme injuste, et proposer des solutions pour trouver l’argent nécessaire ailleurs que dans les poches des classes moyennes et populaires, en particulier des femmes et des personnes ayant commencé à travailler tôt. Ceci en écho au mouvement syndical et aux millions de Français qui se mobilisent partout en France. Retour sur un débat inédit en tout point.

Sur le fond : Une réforme inutile et injuste

  • Une urgence budgétaire insincère

Pour justifier son offensive contre notre système des retraites, le gouvernement a fait valoir la faillite budgétaire à court terme de notre système par répartition. Pourtant, en 2022, le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) a considéré que notre système des retraites n’était pas en danger immédiat.

L’argument massue de l’urgence budgétaire n’est donc pas pertinent en ce qui concerne cette réforme, d’autant que d’autres possibilités de ressources budgétaires n’ont pas été examinées. En effet, comme nous avons eu l’occasion de le rappeler pendant le débat, une plus ample participation du capital au financement des retraites aurait pu permettre d’éviter le report de l’âge légal. De même, nous avons dénoncé le désarmement fiscal opéré par le gouvernement, qui a multiplié les cadeaux fiscaux aux plus fortunés tout au long de son mandat. Ainsi, au total, ce seront 392 milliards d’euros de recettes fiscales qui ont été supprimées et de cadeaux fiscaux octroyés en dix années. Il est regrettable que ce manque à gagner se reporte sur nos concitoyens qui paieront au prix fort les choix de ce gouvernement puisque ce sont les classes populaires sur lesquelles va peser la réduction des soi-disant déficits budgétaires.

  • Une précarisation des plus fragiles

De plus, cette réforme est particulièrement injuste, car en concentrant ses effets sur la hausse de l’âge légal, l’effort demandé s’appliquera à tous, de manière injuste pour ceux qui ont commencé à travailler tôt, qui sont exposés à des métiers pénibles, ou qui ont des carrières hachées.

Nos aînés, les femmes, et les jeunes subiront durement les mesures contenues dans le projet de loi construit par le gouvernement. De fait, les femmes apparaissent d’ores et déjà comme les grandes perdantes. Non seulement 40 % des femmes (32 % des hommes) partent actuellement avec une carrière incomplète, mais en plus, en moyenne, elles partent plus tard à la retraite que les hommes : 19 % des femmes et 10 % des hommes ont attendu 67 ans pour échapper à la décote. Cette réforme précarise encore davantage leur situation. Sur les 18 milliards d’euros d’économie attendus, 11 seront payés par les femmes.

Les seniors seront également pénalisés car on sait déjà qu’en France, au moment de liquider ses droits à la retraite, près d’un assuré sur deux n’est déjà plus dans l’emploi. Dans ces conditions, comment envisager de repousser l’âge de départ à la retraite sans risquer de faire basculer davantage de seniors dans l’inactivité, le chômage voire la précarité ?

Pour les jeunes, c’est la promesse de travailler encore deux ans de plus avant de pouvoir profiter d’un repos bien mérité et l’éloignement de l’entrée sur le marché du travail. Enfin, pour nos retraités, c’est tout-au-plus vingt mille personnes par an qui auront la garantie de recevoir la pension minimum de 1200 euros contrairement aux annonces initiales et les approximations des ministres.

Cette nouvelle réforme constitue donc à tout point de vue, un recul social qui ne répond à aucun objectif réel de réduction des dépenses puisqu’elle sera très rapidement remplacée par une crise de la précarité parmi les séniors notamment qui coûtera davantage encore aux finances publiques. 

Foix, le 19 janvier 2023

Sur la forme : un débat tronqué et empêché au Sénat

Mes collègues du groupe Socialiste et moi-même, et plus largement les sénateurs de gauche, avons dénoncé le processus antidémocratique qui a été choisi par le gouvernement pour faire passer sa réforme. D’abord, l’utilisation de l’article 47-1 de notre Constitution dans le but de réduire le temps des débats est certes légale mais n’en pose pas moins de profondes questions de légitimité et de respect du Parlement. A l’heure où la grande majorité des français et des organisations syndicales refusent cette réforme qui porte atteinte à notre modèle social, le gouvernement ne souhaite ni discuter ni débattre. C’est très regrettable !

C’est donc avec la complicité de la droite qui attend cette réforme de longue date, que le Gouvernement a fait passer en force au Sénat le report de l’âge légal à la retraite de 62 à 64 ans. Seuls contre le mouvement syndical, seuls face à 90 % des Français actifs qui s’y opposent.

Face à une droite silencieuse, seule l’opposition de gauche s’est livrée à un débat de fond sur ce texte.  De fait, depuis le début de son examen, les sénatrices et sénateurs du groupe socialiste se sont battus pied à pied pour faire entendre raison au Gouvernement et à la droite sénatoriale. Mais aussi pour proposer des solutions de financement alternatives qui ne pénaliseraient pas les Français les plus modestes.

En usant de tous les artifices constitutionnels et réglementaires pour museler l’opposition, le gouvernement et la droite sénatoriale, main dans la main, ont organisé le passage en force de cette réforme au Sénat. Ils ont ainsi multiplié les procédures visant à limiter ou à supprimer pour l’opposition la possibilité de s’exprimer ou de défendre leurs amendements.

Un autre modèle à défendre

Pourtant, avec le groupe socialiste et ses partenaires de gauche et écologistes, nous continuerons de nous battre pour lutter contre cette réforme injuste et brutale.

Car notre combat ne s’arrête pas. Les forces de gauche et écologistes au Parlement, les syndicats ont un autre modèle à défendre. Fidèles à notre tradition politique de rigueur et de justice sociale, nous ne manquons pas d’idées pour mettre en place une réforme plus juste et plus égalitaire.

Pourquoi aller chercher l’argent dans les poches des plus précaires de nos concitoyens ? Commençons par en finir avec les coûteuses exonérations de cotisations employeurs consenties par ce gouvernement qui représentent plus de 80 milliards d’euros de perte par an.

Lançons une grande convention pour la revalorisation des salaires notamment, la lutte contre les inégalités de revenus femmes-hommes, et travaillons enfin à de vraies mesures pour l’emploi des seniors.

           

Enfin, renouons le dialogue avec les partenaires sociaux qui représentent les travailleuses et travailleurs de notre pays. Soyons responsables et à la hauteur de l’immense enjeu que représente le futur de nos jeunes générations et le repos bien mérité de ceux qui ont consacré leur vie à leur travail et à l’activité de notre pays. Il est clair que le Gouvernement et la droite n’ont pas entendu la colère des Français et le refus du président de la République de rencontrer l’intersyndicale en témoigne. De mon côté, je continuerai avec mes collègues du groupe Socialiste, écologiste et Républicain de me battre, en déposant notamment un recours au Conseil Constitutionnel et en demandant un référendum d’initiative populaire, pour empêcher une fois pour toute, la mise en œuvre de cette réforme que les Français rejettent massivement.

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