Accès aux services publics : une résolution adoptée par les Sénateurs

Le 31 mai, le Sénat adoptait un projet de résolution proposant au Gouvernement de renforcer l’accès aux services publics.

Car il est loin le temps où le maillage territorial des services publics français faisait de notre pays un exemple. Écoles, médecins, bureaux de poste, transports collectifs, trésoreries, … ont petit à petit désertés nos bourgs et nos villages. Au nom de la rationalisation et d’économies, de l’avènement de l’ère du numérique accompagné par le développement à tout va de la dématérialisation, la ruralité a vu disparaitre la présence physique de l’État de proximité.

Malgré les politiques publiques mises en œuvre, la fracture numérique est encore une réalité pour les 14 millions de nos concitoyens qui ne maîtrisent pas internet et l’accès aux services en ligne sont difficiles pour un français sur deux. Le fossé qui s’est creusé remet en question le principe de l’égalité des droits fondement de notre République.

Des territoires ruraux dont la géographie et la sociologie rendent l’accès aux services publics difficile

Dans les territoires ruraux, le plus souvent non desservis par les grandes infrastructures de transports, marqués par une faible densité de population, une proportion élevée et croissante de personnes âgées, un relatif déclin économique et de fait une population fragile et précarisée, la disparition du maillage des services publics accentue ces déséquilibres territoriaux. Les vagues successives de fermetures et de réduction des coûts sous couvert de la modernisation de l’État, ont concentré les services à la population dans les pôles urbains, les éloignant toujours plus de l’usager.

Bureaux de poste, services au public des préfectures et sous-préfectures, trésoreries, gendarmeries, écoles, maternité, hôpitaux, … la logique de fermeture est allée loin.

L’ensemble de ces constats converge vers l’idée de favoriser l’accès numérique aux services publics qui le permettent. Encore faut-il que deux conditions soient réunies : que les infrastructures numériques le permettent et qu’il existe des dispositifs d’accompagnement de la population dont l’âge et les caractéristiques socio-économiques compliquent l’usage des instruments numériques. Or ces deux conditions sont loin d’être remplies.

Les limites de l’accès physique et numérique

En l’absence d’une amélioration des infrastructures et d’un accompagnement efficace et anticipé de la population vers le numérique, la dématérialisation ne peut constituer une solution spontanée aux difficultés d’accès aux services publics constatées dans nos territoires. Au contraire, insuffisamment anticipée et expliquée, elle renforce le sentiment d’exclusion qui est parfois celui de leurs habitants et cristallise les tensions.

L’enquête de « 60 millions de consommateurs » et de la Défenseuse des Droits, publiée en janvier dernier est éloquente. Alors que 15% des français n’ont pas internet et 28% ne sont pas en capacité de réaliser les démarches en ligne, les alternatives de services téléphoniques sont de qualité très inégale. Si 8 appels sur 10 à Pôle Emploi aboutissent et donnent une réponse satisfaisante à 70% des demandes, il n’en est pas de même de l’assurance maladie. En effet seul 28% des contacts permettent de joindre un interlocuteur après 3 tentatives et 5mn d’attente pour chacune d’elles, pour in fine 22% de réponses adaptées.

Si dans ce contexte de numérisation des démarches administratives l’on peut se réjouir à chaque ouverture d’une maison France-Services dans une commune, force est de constater qu’elles viennent trop souvent pallier la disparition au fil du temps des présences physiques dans des antennes ou permanences de proximité.  Le dispositif permet d’offrir un accompagnement adapté, mais il faut toutefois relever que moins d’un quart des France-Services sont accessibles en transport en commun alors que le problème de la mobilité est flagrant dans nos campagnes et touche trop souvent les mêmes publics empêchés du numérique : personnes âgées ou en situation d’handicap, publics précaires, ….

Certes des conseillers en numérique sont recrutés pour lutter contre l’illectronisme en proposant un accompagnement sur mesure mais face aux 14 millions de Français concernés, les politiques publiques d’inclusion numérique demandent à être renforcées sans oublier les plus jeunes qui même addicts de leur smartphone sont trop nombreux à être en difficulté face aux démarches en lignes. La réussite de la transition numérique passe par le développement d’une stratégie numérique inclusive qui devrait débuter dès le parcours scolaire.

Un accès aux services publics à repenser dans les territoires

L’accès aux services publics dans les territoires ruraux constitue un élément de la politique d’aménagement du territoire mais surtout d’égalité des droits et des chances.

Ainsi la réussite de la transition numérique nécessite le déploiement des infrastructures de très haut débit pour tous et partout.

De même il est indispensable de clarifier les compétences et le pilotage des politiques pour améliorer l’accessibilité aux services publics également au travers de leur implantation. Comment se satisfaire de statistiques nationales sur la viabilité des maternités en termes de sécurité et de coût à partir de 300 accouchements par an, qui condamneraient par exemple celle de Saint Girons !

Les Schémas Départementaux d’Amélioration de l’Accessibilité des Services au Public (SDAASP) mis en place en 2017 constituent un outil opérationnel novateur pour l’accès aux services publics dans les territoires ruraux. Cette dimension opérationnelle doit toutefois être confirmée et déclinée localement, s’articuler avec les autres outils de planification existants et bénéficier d’un fléchage prioritaire des financements de l’État pour permettre un rééquilibrage territorial.

Pour tout cela, il est nécessaire de renforcer tous les modes d’accès aux services publics et de prévoir un partenariat plus équitable entre l’État et les collectivités locales.

C’est bien l’enjeu de l’attractivité et du dynamisme des territoires que j’ai soutenu au travers de cette résolution, la défense d’une ruralité vivante, un pari sur l’avenir et nos jeunes générations.

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