Hydroélectricité : un tournant décisif pour nos barrages et nos territoires

Après plus de vingt ans de contentieux avec la Commission européenne, un accord de principe a été trouvé sur l’avenir des concessions hydroélectriques. C’est une étape décisive pour redonner des perspectives à la filière et relancer les investissements. L’Ariège, qui est le 5ᵉ département producteur d’hydroélectricité en France et le premier dans les Pyrénées, est directement concernée par ces enjeux. Au Sénat, je veille à ce que cet accord soit solide, juste et porteur d’avenir pour EDF, pour la filière et pour la souveraineté énergétique de la France.

Un contentieux qui a freiné nos barrages

Depuis deux décennies, Bruxelles reproche à la France l’absence de mise en concurrence lors du renouvellement des concessions échues et la position dominante d’EDF, qui exploite près de 80 % du parc hydroélectrique national.

Ces désaccords ont eu des conséquences lourdes : faute de visibilité, les investissements ont été bloqués, les travaux de modernisation reportés et de nouveaux projets retardés. Pendant ce temps, la France accumulait un retard préoccupant alors que l’hydroélectricité est un pilier essentiel de notre système électrique et de la transition énergétique.

L’accord de principe annoncé en août dernier ouvre enfin une perspective claire : sortir de l’impasse, sécuriser l’avenir juridique des concessions et redonner confiance aux acteurs.

Le rôle du Sénat : sécuriser et préparer l’avenir

Au Sénat, nous avons pris nos responsabilités en constituant une mission d’information transpartisane, dont j’ai l’honneur d’être corapporteur pour les sénateurs socialistes. Nous avons mené 25 auditions auprès du gouvernement, des autorités de régulation, d’EDF et de ses syndicats, des concurrents, de la Commission européenne, mais aussi des associations d’élus locaux.

Notre mission a pour but de sécuriser juridiquement les accords possibles avec l’Union européenne afin d’éviter tout nouveau contentieux, d’en analyser les incidences économiques pour préserver la compétitivité du secteur et la stabilité des prix, de veiller à ne pas affaiblir EDF dans ses missions de service public, et enfin de définir les moyens de relancer les investissements pour rattraper le retard accumulé.

Les solutions en discussion

L’accord annoncé en août par le Gouvernement repose sur trois volets :

  • le passage progressif d’un régime de concession à un régime d’autorisation,
  • le maintien des exploitants actuels afin d’assurer la continuité et la sécurité des ouvrages,
  • et une mise à disposition par EDF de capacités hydroélectriques « virtuelles » à destination de tiers, afin de répondre aux exigences de concurrence.

Cette orientation correspond à la piste identifiée par notre mission comme la plus prometteuse. Mais elle doit encore être précisée dans ses modalités. C’est pourquoi nous avons formulé 15 recommandations, organisées en quatre grands axes.

Vers un changement de régime réussi

Notre mission sénatoriale a identifié plusieurs conditions indispensables pour que le passage des concessions vers un régime d’autorisation soit une réussite.

Ce changement doit d’abord être juridiquement solide et financièrement soutenable, afin d’éviter tout nouveau contentieux et de préserver l’équilibre économique du secteur.

Il doit aussi garantir des paramètres sociaux stables, en veillant à la place des salariés et au rôle central d’EDF.

Au-delà, l’avenir de l’hydroélectricité doit s’inscrire dans une gouvernance mieux adaptée aux réalités locales, en associant davantage les collectivités et en tenant compte des enjeux climatiques et environnementaux.

Enfin, ce nouveau cadre devra être cohérent avec les grandes orientations européennes et nationales en matière d’énergie, pour donner à la filière hydroélectrique la visibilité et la stabilité dont elle a besoin pour investir et se développer.

L’hydroélectricité, bien plus qu’une énergie renouvelable

On réduit trop souvent l’hydroélectricité à une source d’électricité. Elle est en réalité beaucoup plus. Première source d’électricité renouvelable du pays, deuxième source de production après le nucléaire, et seule technologie de stockage massif disponible, elle est indispensable pour compenser l’intermittence de l’éolien et du solaire.

Mais les barrages sont aussi des outils de gestion de l’eau : ils constituent des réserves vitales face aux sécheresses, sécurisent l’irrigation agricole, participent à l’alimentation en eau potable et jouent un rôle dans la prévention des inondations. Ils sont également au service de la biodiversité et de l’équilibre écologique des cours d’eau.

L’avenir de l’hydroélectricité, c’est donc à la fois notre énergie, notre eau, notre agriculture, notre biodiversité et l’aménagement durable de nos territoires.

Transformer l’impasse en opportunité

L’accord de principe avec Bruxelles est une avancée majeure, mais tout reste à faire. Le travail de notre mission sénatoriale, dont le rapport sera rendu public le 1er octobre, vise à poser des garde-fous, à tracer des lignes rouges et à proposer des solutions concrètes pour réussir ce changement de régime.

Notre responsabilité est claire : transformer un contentieux vieux de vingt ans en une opportunité pour renforcer notre souveraineté énergétique, moderniser nos barrages, relancer les investissements et assurer un développement durable de nos territoires.

En garantissant un cadre juridique solide, en protégeant EDF et ses salariés, en associant les collectivités et en simplifiant les règles, nous pouvons faire de l’hydroélectricité un atout majeur de la France pour les décennies à venir.

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