Déchets du bâtiment, textiles : l’urgence d’un soutien réel aux acteurs du recyclage
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Alors que la France connaît de graves dysfonctionnements dans plusieurs filières de recyclage – déchets du bâtiment, textiles, plastiques – j’ai récemment interpellé le Gouvernement sur les conséquences du moratoire qui paralyse la filière des déchets du bâtiment. Le Sénat vient de publier un rapport exigeant une réforme en profondeur du système. Si la réduction des subventions publiques est envisageable, il est impératif que les éco-organismes et l’État soutiennent réellement les collectivités et les entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) qui font vivre l’économie circulaire au quotidien.
Un moratoire qui pénalise les collectivités et les contribuables
Depuis mai dernier, le moratoire décidé par le Gouvernement sur la filière de recyclage des déchets du bâtiment a suspendu la mise en œuvre d’un réseau national de collecte pourtant prévu par la loi Antigaspillage et Économie Circulaire (AGEC).Dans les territoires ruraux, comme en Ariège, cette décision a eu des conséquences immédiates : faute d’opérateurs privés, ce sont les collectivités qui continuent d’accueillir et de traiter ces déchets dans leurs déchetteries publiques. Résultat : un transfert de charges injuste vers les contribuables locaux, contraire au principe du pollueur-payeur.
Pire encore, plusieurs éco-organismes refusent de contractualiser avec les collectivités, ou ne respectent pas leurs engagements. Certains vont jusqu’à suspendre l’enlèvement de flux de déchets comme le plâtre ou les huisseries, pourtant sous leur responsabilité. C’est pourquoi j’ai saisi le Gouvernement, afin qu’il mette fin à ce moratoire et contraigne les éco-organismes à respecter leurs obligations.
Des crises à répétition dans les filières de recyclage
Cette situation n’est pas isolée. Cet été encore, la filière du textile a connu une grave crise : l’entreprise Le Relais, acteur historique du réemploi, a alerté sur la rétention de fonds opérée par l’éco-organisme Refashion, menaçant des centaines d’emplois dans l’économie solidaire. Je m’étais déjà mobilisé pour défendre ces structures de l’ESS, comme VERTEX, , Emmaüs et les ressourceries ariégeoises, essentielles au tri et à la réutilisation dans le secteur du textile.
Ces crises traduisent un dysfonctionnement profond : les éco-organismes accumulent des trésoreries importantes sans pour autant remplir leurs objectifs. Le rapport sénatorial présenté par Christine Lavarde, dans le cadre d’une mission de contrôle de la commission des finances, montre que la moitié des éco-contributions perçues – soit près d’un milliard d’euros – reste thésaurisée, alors que 40 % des déchets soumis à une responsabilité élargie du producteur échappent encore à la collecte.
Les préconisations du Sénat : encadrer, investir, responsabiliser
La mission de contrôle du Sénat a formulé sept recommandations pour redresser la situation. Parmi elles :
- Encadrer les provisions financières des éco-organismes pour les obliger à financer des actions concrètes ;
- Renforcer le contrôle de l’État sur ces filières, en mutualisant les moyens de supervision ;
- Et surtout, permettre aux éco-organismes de soutenir l’investissement dans leur filière à travers des appels à projets pour renforcer les capacités de recyclage et de réemploi sur le terrain.
Le rapport suggère également de réduire progressivement les subventions publiques, mais pour cela, il faudra s’assurer que les filières de la Responsabilité Elargie des Producteurs -REP – et les éco-organismes assument pleinement leurs responsabilités financières.
Soutenir les acteurs locaux et l’économie solidaire
Je partage ce constat : il est légitime d’exiger plus d’efficacité et de transparence de la part des éco-organismes. Mais il serait injuste de désengager totalement l’État au moment où les entreprises de l’économie sociale et solidaire investies depuis des années dans ces filières peinent à maintenir leurs activités. Ces structures participent à la deuxième vie des déchets et des matériaux, créent des emplois locaux et favorisent la cohésion sociale. Elles ont besoin d’un accompagnement financier durable, tant pour leur fonctionnement que pour leurs investissements.
Redonner sens au principe du pollueur-payeur
La transition vers une économie circulaire ne pourra réussir qu’à une condition : rendre les filières REP réellement opérationnelles et équitables. Les collectivités, qui assurent au quotidien la collecte et la gestion des déchets, doivent être soutenues, pas abandonnées. Les éco-organismes doivent, eux, cesser de thésauriser et reverser les contributions là où elles sont dues : sur le terrain, auprès des acteurs qui relèvent chaque jour les défis du recyclage.
C’est ce message que je continuerai à porter au Sénat, avec détermination, pour défendre nos territoires et ceux qui agissent concrètement pour une économie circulaire juste et efficace.