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Publiée le 25/08/2022
Jean-Jacques Michau attire l’attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications sur la situation des collectivités ayant investi dans des réseaux d’initiative publique.
Dans le cadre du plan France très haut débit lancé en 2013, les collectivités ont eu la possibilité de développer leur propre réseau d’initiative publique pour équiper sociétés, particuliers et services publics en très haut débit. La solution majoritairement retenue par les collectivités a été la mise en place d’une délégation de service public (concession, affermage ou solution mixte comme l’Ariège).
Ces contrats d’une durée moyenne de 20 ans, permettent à la collectivité de fixer les tarifs d’accès au réseau que le délégataire applique aux différents fournisseurs d’accès internet (FAI) dont les principaux sont Orange, SFR, Bouygues et Free.
En Ariège, ces tarifs sont décomposés en deux éléments : un tarif de cofinancement, fixé à 513 € par ligne versé par le FAI, qui permet de réduire le coût de l’investissement du réseau ; un tarif récurrent de 5€ par ligne et par mois payé toujours par le FAI pour financer les frais d’exploitation, de renouvellement ou d’extension du réseau. Ces tarifs sont fixés pour la durée de la délégation de service public (DSP) et à l’issue de cette DSP, la collectivité reprend le contrôle du réseau et décide de nouvelles conditions de gestion (régie, DSP, vente…) et des nouveaux tarifs de mise à disposition des FAI de ce réseau.
Or, il s’avère que l’opérateur Free a décidé, dans le cadre de négociations relatives aux durées d’exploitation, d’imposer d’autres conditions que celles prévues initialement en exigeant que ce tarif de cofinancement soit valable pour 40 ans. La DSP ayant une durée de 20 ans, l’accord de la collectivité est donc requis pour la période excédant ces 20 ans. C’est notamment le cas du département de l’Ariège qui se voit confronté à ce type de demande.
Certains élus dénoncent même « une forme de complaisance du régulateur avec les opérateurs » qui pousse à changer les règles du jeu, fragilisant ainsi les équilibres financiers. Confrontées à cette demande, beaucoup de collectivités ont dû se résoudre à accepter ces conditions. Or, des sommes très importantes pourraient être en jeu. Ainsi, pour l’Ariège, le revenu de la DSP signée sur cinq ans s’élève à 51 300 000 € en co-investissement et environ 70 000 000 € pour le récurrent. Pour cette dernière somme, la non-évolution du tarif découlant de cette décision serait un réel manque à gagner pour la collectivité qui pourrait représenter jusqu’à plusieurs dizaines de millions d’euros.
Il lui semble donc opportun de s’interroger sur la légalité de telles pratiques qui contreviennent, semble-t-il, aux dispositions initialement prévues et qui mettent les collectivités au pied du mur.
Il souhaiterait donc connaître ses intentions afin d’empêcher le recours à de telles pratiques qui mettent les collectivités en difficulté, alors même qu’elles assument l’investissement dans nos territoires et participent massivement à sa prise en charge
Publiée le : 27/10/2022, page 5348
Dans le cadre de la commercialisation d’un réseau d’initiative publique (RIP), il appartient à l’opérateur d’infrastructure (OI), conformément à l’article L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques de « faire droit aux demandes raisonnables d’accès […] et aux moyens qui y sont associés émanant d’opérateurs, en vue de fournir des services de communications électroniques à un utilisateur final ».
L’assujettissement à cette disposition figure notamment au nombre des obligations issues de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) : il incombe donc au porteur de projet de RIP de respecter ou de faire respecter par son exploitant, les demandes d’accès émanant d’opérateurs en termes d’accès au réseau.
L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) a complété ce cadre général par la décision 2010-1312, qui détaille les modalités de mutualisation du réseau. En particulier, cette décision impose à l’opérateur d’infrastructure de proposer une offre de cofinancement du réseau de fibre optique jusqu’à l’abonné (FttH) qui permette aux opérateurs commerciaux d’investir dans le réseau en échange d’un droit d’usage pérenne et amortissable.
Dans le cadre de deux règlements de différend (décision 2018-0569-RDPI et 2020-1498-RDPI), l’Arcep a estimé d’une part que « les droits d’accès d’une durée initiale de 20 ans ne permettaient pas de satisfaire les besoins de visibilité et de transparence sur la durée des droits d’usage, et qu’il s’agissait donc d’étendre la durée des droits d’accès à au moins 40 ans, dans des conditions transparentes et prévisibles, permettant de disposer de la visibilité adéquate au regard des investissements consentis et de la solidarité sur l’entretien du réseau », et d’autre part que « le statut particulier de cofinanceur du réseau FttH implique que celui-ci dispose d’une prévisibilité et d’une transparence adéquate, s’agissant notamment des dépenses récurrentes, ainsi que la visibilité nécessaire lui permettant d’apprécier le caractère raisonnable des évolutions tarifaires envisagées ».
Ces principes sont repris dans la recommandation en date du 8 décembre 2020, qui dispose qu’il est « raisonnable qu’un opérateur commercial puisse disposer de droits d’usage d’une durée d’au moins 40 ans dans le cadre de son cofinancement en zones moins denses ». En vertu du cadre communautaire des aides d’État et du régime d’aides autorisé par la Commission Européenne dans sa décision SA.37183 « Plan France Très Haut Débit » du 7 novembre 2016, tout réseau d’initiative publique ayant bénéficié d’aides d’État dans le cadre du Plan France Très Haut Débit doit garantir « aux opérateurs commerciaux des conditions économiques d’accès similaires à celles qui prévalent dans les zones d’initiative privée ».
Le respect du cadre réglementaire est un principe essentiel prévu dans le cahier des charges de l’appel à projet « France Très Haut Débit – Réseaux d’initiative publique » et repris dans les conventions de financement qui définissent les conditions du soutien de l’État. En particulier, il est prévu que l’obligation d’établir un catalogue de services compatible avec les recommandations ou décisions de l’Arcep en matière de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre optique. La plupart des collectivités concernées ont d’ores et déjà modifié leurs contrats de façon à se conformer aux obligations rappelées ci-dessus.
Afin de préserver l’équilibre économique des délégations de service public (DSP) tout en offrant des droits d’usage d’une durée suffisante aux opérateurs cofinanceurs, divers mécanismes contractuels ont pu être mis en œuvre par ces collectivités, par exemple : l’introduction d’une clause de solidarité de l’opérateur cofinanceur (à hauteur de son taux de cofinancement) sur les éventuels réinvestissements nécessaires durant la vie du réseau, l’introduction d’une clause de revoyure à l’issue de la DSP, prévoyant une négociation sur l’évolution de certains tarifs, en cas de déséquilibre économique avéré, pouvant aboutir sous conditions à une réévaluation unilatérale par la personne publique. Les services de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), comme sur tout sujet concernant les réseaux d’initiative publique, peuvent être saisis et faire le lien, si cela s’avère pertinent, avec les services de l’Arcep.
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